Le sexe peut dégoûter. Mais pourquoi ?
On n’en parle pas souvent.
Parce que ça dérange. Parce que ça heurte cette image lisse qu’on se donne de la sexualité.
Pourtant, oui — le sexe peut dégoûter.
Pas toujours. Pas tout le monde. Mais parfois, ça bloque, ça révulse, ça crispe.
Et la vraie question, ce n’est pas “comment ne plus être dégoûté”.
C’est “d’où vient ce dégoût ?”
Parce qu’on ne naît pas avec du rejet dans le corps.
On le fabrique. On nous le transmet.
L’origine du dégoût
🕯️ Ce que nos parents ne disent pas, mais montrent
Aucun bébé ne trouve le corps sale. Aucun enfant ne pense que le plaisir est honteux.
Tout ça vient après.
Des regards qui se détournent.
Des silences gênés à table quand la télé parle de sexe.
Des phrases anodines qui laissent des traces :
« Ce n’est pas joli pour une fille. »
« Un garçon bien, ça ne pense pas qu’à ça. »
Rien d’explosif, rien d’agressif.
Mais tout s’imprime.
C’est là que naît le premier vernis du dégoût.
Une idée floue, rampante : le sexe, c’est suspect.
C’est quelque chose qu’on cache, qu’on murmure, qu’on tait.
Freud l’avait déjà observé : « La sexualité infantile n’est pas absente, elle est refoulée. »
Et ce refoulement, transmis de génération en génération, crée des adultes qui veulent jouir… sans oser se toucher vraiment.
La honte apprise
🪞 L’éducation comme miroir déformant
Notre rapport au sexe, c’est d’abord une éducation émotionnelle.
Pas seulement biologique.
On nous apprend très tôt ce qui est “bien” et ce qui ne l’est pas.
Mais qui décide ?
Quand une mère dit à son fils : “Ne te tripote pas devant les autres”, elle veut le protéger.
Mais le message caché, c’est : ton plaisir dérange.
Quand un père dit à sa fille : “Couvre-toi, fais attention aux garçons”, il veut la préserver.
Mais il lui apprend aussi : ton corps est dangereux, ton désir, suspect.
Résultat : on grandit avec un mélange explosif de honte et de curiosité.
On veut voir, mais on se sent coupable de vouloir.
On veut sentir, mais on a peur d’être jugé.
Et la honte devient réflexe.
Elle colle à la peau.
Nietzsche disait : « Il n’y a pas de faits, seulement des interprétations. »
Le dégoût, c’est souvent ça : l’interprétation héritée d’une morale étrangère à soi.
Le corps contre le mental
⚡ Quand le désir se heurte à la peur
Adulte, tu crois que c’est toi qui décides.
Mais ton corps, lui, se souvient.
Tu veux, tu t’approches, tu sens cette tension, et d’un coup, tout se fige.
Le cœur bat trop vite.
Le ventre se serre.
Le corps se ferme.
Et tu ne comprends pas.
Ce n’est pas un manque de libido.
C’est un trop-plein de jugements intégrés.
Ton esprit a enregistré que le sexe est sale, que ton plaisir est suspect, que ton envie est déviante.
Alors il sabote.
Il bloque pour te protéger.
Mais de quoi ?
De la liberté.
De toi-même.
Et pourtant, comme l’écrivait Georges Bataille : « L’érotisme est l’approbation de la vie jusque dans la mort. »
Approuver le sexe, c’est approuver la vie, dans toute sa crudité, son animalité, son intensité.
Revenir à soi
🌿 Réapprendre à regarder sans juger
Le dégoût n’est pas une fatalité.
C’est un signal. Une invitation à regarder d’où vient le malaise.
À questionner ce qu’on t’a transmis, et à refuser d’en hériter aveuglément.
Tu peux réapprendre à regarder ton corps sans le fuir.
À observer tes réactions sans te condamner.
À ressentir sans analyser.
Petit à petit, le dégoût se transforme.
Il perd son pouvoir, laisse place à la curiosité, à la douceur, parfois à la joie.
Parce que le corps, quand on le laisse respirer, sait retrouver le plaisir.
André Comte-Sponville écrivait : « La sexualité est une sagesse du corps. »
Et cette sagesse, elle s’apprend. Pas dans les livres, mais dans la peau.
En s’autorisant à sentir sans juger.
Se réapproprier le désir
🔥 Créer sa propre carte du plaisir
Le plus grand acte de liberté sexuelle, c’est de penser par soi-même.
Pas selon les normes, ni les interdits familiaux.
Mais selon ce que ton corps, ton cœur, te murmurent.
Le dégoût n’est pas ton ennemi.
C’est une étape, un passage obligé pour désapprendre.
Il t’indique où regarder, ce qu’il faut nettoyer.
Tu n’as pas à aimer tout, ni à tout explorer.
Mais tu peux au moins choisir ce que toi, tu trouves beau, excitant, vivant.
Sans qu’aucun passé ne te dicte sa loi.
Le sexe n’est pas sale.
C’est la peur qu’on y colle qui l’est devenue.